La culture dans la cuisine vietnamienne

La gastronomie est l’un des points forts du tourisme vietnamien en raison de sa spécificité et sa finesse. Il est certes difficile de la décrire en détail, parce que la cuisine vietnamienne est très variée tant par le nombre de plats (environ 500) que par ses variantes régionales : Nord, Centre et Sud. Mais s’il faut résumer en quelques mots les spécificités de l’art culinaire du Vietnam, n’oubliez pas ceux-ci :

 

Le Riz dans la cuisine vietnamienne

 

Pour dire, de manière imagée, que quelqu’un est mourant ou très malade, le vietnamien utilise souvent l’expression: “il ne veut plus du riz, il veut goûter la terre”.Pour parler d’un mari infidèle rêvant à une autre femme que sa compagne, on dit : “il en a assez du riz, il veut goûter la soupe chinoise”. Un homme heureux est comparé à “un rat dans un pot de riz“.

Le riz, référence culturelle essentielle du Vietnam, constitue l’aliment de base des ses habitants du Nord au Sud. Le riz est présent à la table du matin au soir, de janvier à décembre, à la campagne comme en ville. Le repas d’une famille paysanne se composent généralement de trois plats : le riz, les végétaux et un peu de viande ou de poisson. Le bon riz est un cadeau précieux que les gens de la campagne offrent à leurs parents et amis citadins lorsqu’ils leur rendent visite et aux grands moments de l’année. On dirait qu’au Vietnam, une longue journée est comme une journée sans riz.

 

La poudre de riz sert d’ingrédient d’un très grand nombre de plats (nem, raviolis, crêpe, soupe tonkinoise, vermicelle, galette de riz, gâteau de riz etc…). Le riz peut être complet, rond, long, concassé, parfumé, gluant etc. Il peut provenir du delta ou des montagnes, des récoltes d’été ou des récoltes d’hiver. Il peut être ancien (récolté l’année précédente) ou nouveau.

 

Une cuisine à base de légumes

 

Les préparations les plus connues avec les légumes sont: légumes cuits à l’eau, légumes fermentés, légumes sautés à l’huile et salades de légumes hachés.

 

Parmi les végétaux, le liseron d’eau et l’aubergine sont tellement communs qu’ils sont rentrés dans la littérature. Une vieille chanson populaire, que presque tous les vietnamiens nés à la campagne apprennent par coeur, disait ceci

“Je pars et mon village natal me manque, Tout comme le bouillon de liseron d’eau L’aubergine fermentée Et la sauce de soja …”

Ceux qui ont regardé le film « L’odeur de la papaye verte » du réalisateur français d’origine vietnamienne Tran Anh Hung , se souviennent sans doute de cette plante modeste se cachant dernière les maisons, offrant des fruits qui, verts, sont consommés comme des légumes et, une fois mûrs, comme des fruits véritables. Certains ont dit que la papaye verte est le symbole des femmes vietnamiennes, timides mais entreprenantes. Mais pour parler de symboles, le liseron d’eau a également ses mots à dire : modestie (il pousse sur la surface des mares et rivières ou de petits cours d’eau), vitalité (il suffit de jeter un tige dans l’eau, et on aura toute une mare de liseron d’eau trois mois après), beauté (ses fleurs fines , violettes ou blanches en fonction de leur variété, ont un pouvoir de séduction indéniable), richesse (le rêve d’abondance du paysan se résumait dans ce proverbe : une mare de liseron d’eau et une jarre pleine de sauce de soja).

 

Souvent vu comme un plat de résistance des pauvres, le liseron d’eau (voir photo) est néanmoins très apprécié dans les repas quotidiens en ville. Bouilli, il est consommé avec la saumure de poisson (nuoc-mâm) ou la sauce de soja. Son bouillon relevé par du citron, des mangues vertes ou des fruits de pancovier, lui donne tout son pouvoir désaltérant en été. Sauté avec du boeuf ou de la viande de buffle, il devient le plat des fêtes.

 

Les aubergines fermentées dans une jarre de terre cuite font office de conserve pour une saison ou même pour toute l’année. On compte plusieurs espèces d’aubergine : aubergines bols (de forme des bols), aubergines pétards (qui éclatent quand on les croque, aubergines violettes ou aubergines de Hue, aubergines verge de bouc etc. L’aubergine fermentée est l’amie fidèle des jours de misère. Un proverbe le rappelle “L’aubergine moisit dans un coin du garde-manger. Que survienne un malheur et on s’en souviendra”.

 

Un conte populaire nous raconte l’histoire d’un roi qui, à force de ne toucher qu’aux plats majestueux, finit par avoir horreur de ses repas. La Cour fait donc venir un talentueux lettré qui propose de préparer pour sa Grande Majesté une soupe de cailloux. Le roi approuve l’initiative, sans doute en raison de son étrangeté, mais le plat est long à préparer. Au bout de la deuxième journée, sachant que le roi a grande faim et ne peut plus attendre, le soit disant cuisinier demande qu’on lui apporte du riz et des aubergines fermentées, en disant qu’il s’agit du plat préparé depuis deux jours. Le roi a mangé avec un appétit qu’il n’a jamais connu de sa vie.

 

L’utilisation des baguettes dans la cuisine vietnamienne

On a l’habitude d’attribuer aux Chinois la fondation de la civilisation des baguettes. Plusieurs historiens ont cependant mis en évidence les liens entre l’utilisation des baguettes et la civilisation de riziculture de l’Asie du Sud Est.

A l’époque antérieure à l’unification de la Chine par Qing Shi Huang Di, les Chinois continuaient à se servir de la main pour saisir la nourriture. C’était une tradition des peuples cultivant du millet, de l’orge et mangeant du pain, de la brioche et de la viande. Ils ne commencèrent à se servir des baguettes qu’au moment de leur expansion vers le Sud de la Chine. C’est ce qui dit un historien chinois. Les baguettes ne peuvent être fabriquées en effet que dans une région où l’abondance des bambous n’est plus mise en doute. C’est le cas de la Chine du Sud et de l’Asie du Sud Est. Elles sont l’outil rudimentaire façonné à l’image du bec de l’oiseau pour pouvoir saisir efficacement le grain de riz et les poissons et pour ne pas salir les mains avec les plats ayant tendance à contenir de l’eau (soupe, potage, saumure etc…). Par ailleurs, à la différence de la culture nomade fondée sur l’élevage,la culture du riz en champ inondé demande plus de solidarité que de discipline. Cette solidarité se traduit non seulement par le regroupement des populations d’agriculteurs dans les villages (d’où naît la culture villageoise) mais également par les habitudes, y compris les habitudes alimentaires. On constate par exemple que dans un repas vietnamien, les plats ne sont pas servis dans les assiettes dont chacun en a une. Au lieu d’une assiette, chaque personne a donc une baguette avec laquelle elle se sert On trouve dans l’utilisation des baguettes des vietnamiens une philosophie à la fois simple et humoristique. Une paire de baguettes est comparée à un couple. Une chanson populaire nous dit:

Le mari et la femme sont comme une paire de baguettes. Si le mari est petit, et que la femme est grande On dirait une paire de baguettes disproportionnée Vous avez beau de les mettre ensemble Jamais il n’y aura d’équilibre.

Rien n’est pire qu’une paire de baguettes disproportionnée, car elles ne permettent pas de saisir les aliments avec facilité. Un dicton vietnamien nous le dit : Une femme stupide vaut mieux qu’une paire de baguettes disproportionnée. Telle est l’importance de cet outil usuel avec lequel on croque la vie au Vietnam.